Citations

« Cent "non" font moins de mal qu'un "oui" jamais tenu. »
Sagesse asiatique.

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« Il est important de promouvoir une unité qui ne peut pas et ne veut pas être une uniformité, mais qui est capable de garantir le respect des différences nationales et des diverses traditions culturelles qui constituent une richesse dans la symphonie européenne, en rappelant d’autre part que “l’identité nationale elle-même ne se réalise que dans l’ouverture aux autres peuples et à travers la solidarité envers eux” (Ecclesia in Europa, n. 112). »

Benoît XVI, Palais de l’Élysée, 12 septembre 2008

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Mise en ligne (colonne de droite) de documents de l'Institut de Relations Internationales & Stratégiques (IRIS)

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Nouvelle offensive d'été de l'ARN

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jeudi 25 décembre 2008

Le rapport des membres de l’Académie d’Agriculture de France: quelle politique agricole pour l'europe


extrait choisi du rapport
Il n’est plus contesté aujourd’hui que la Politique Agricole Commune, n’est plus adaptée aux nouvelles exigences de la société et à la nouvelle donne économique et sociale mondiale.

Dans ces circonstances, des donateurs, dont on trouvera les noms à la fin de cette note, ont jugé nécessaire d’apporter leur contribution à ce vaste chantier de la réforme de la PAC.

Ce que l’on appelle aujourd’hui « politique agricole » est bien plus qu’une politique
d’accompagnement de la production agricole. Il s’agit en fait d’une politique agricole,
alimentaire, environnementale et territoriale, qui vise à assurer régulièrement
l’approvisionnement alimentaire des consommateurs en quantités et en qualité, à des prix
stables et raisonnables, tout en préservant l’avenir. Elle doit par conséquent s’inscrire dans
une vision politique globale, axée sur les exigences des consommateurs et les attentes des
citoyens, tout en prenant en considération les intérêts des agriculteurs et les particularités de
l’agriculture.


L’Union Européenne compte aujourd’hui près de 500 millions de consommateurs. Elle
constitue ainsi le premier marché solvable du monde. Il est parfaitement illusoire de penser
que le marché mondial puisse subvenir régulièrement en quantités, en qualité et en toute
sécurité aux besoins des consommateurs européens. L’embargo américain sur le soja en
1973 comme les difficultés d’approvisionnement que certains marchés connaissent
actuellement, témoignent de l’importance pour l’Europe d’assurer son indépendance et sa
sécurité alimentaires.

Si les conditions prévalant après la seconde guerre mondiale ont pu justifier dans les années
60 la mise en place en Europe d’une politique volontariste de sécurité alimentaire, force est
de constater que la fin de la guerre froide n’a pas réduit la grande instabilité qui caractérise
le monde dans lequel nous vivons, ce qui justifie aujourd’hui comme hier, la nécessité, pour
l’Europe, de préserver sa souveraineté alimentaire.


Seule une Politique Agricole ambitieuse et cohérente peut permettre d’atteindre ce faisceau d’objectifs.

L’expérience des politiques agricoles menées depuis deux décennies montre que la voie
dans laquelle s’est engagée l’Europe depuis 2003, voire depuis 1992, conduit à une
impasse. Toute la logique des réformes entreprises ou proposées est en effet construite sur
un postulat, développé par l’OCDE et repris par l’OMC lors du Cycle de l’Uruguay, celui de la
vertu du marché mondial et de la libéralisation des échanges internationaux qui
augmenteraient leur efficacité.



L’observation des effets de l’Accord OMC sur l’Agriculture de 1994 et de la première étape
de réformes des politiques agricoles qui l’ont accompagné, montre qu’aucun des objectifs
recherchés n’a été atteint, ni en matière de réduction des soutiens publics à l’agriculture, ni
en matière de stabilisation des cours internationaux, ni en matière de développement
économique des pays les moins avancés.


Hormis quelques grands pays exportateurs qui bénéficient de rentes géographiques et structurelles spécifiques pour certains produits, la plupart des Membres de l’OMC ne retrouvent pas leur compte dans les propositions actuelles. Les travaux des économistes, venus d’horizons les plus divers, convergent aujourd’hui sur un certain nombre de constats qui montrent qu’aucune augmentation significative du bien-être collectif ne peut résulter de la libéralisation des échanges agricoles. En effet, livrés à eux mêmes, les marchés agricoles sont instables, chaotiques et induisent des comportements spéculatifs ou d’aversion, au risque, préjudiciables à l’investissement, à l’amélioration de la productivité1, et aux consommateurs.



Ces travaux convergent aussi pour montrer que le classement des aides à l’OMC n’a
aucune pertinence : les aides dites « découplées » ont autant d’effets sur les marchés
que les autres aides. Dès lors, le découplage total ou même partiel des aides qu’a choisis la
Communauté en 2003 et que la Commission se propose de renforcer dans son « Bilan de
Santé », apparaît comme une négation des principes qui sont à l’origine des politiques
agricoles, à savoir la nécessité d’une maîtrise des fluctuations de production et
de prix à des niveaux raisonnables et stables. Par ailleurs, il sera de plus en plus difficilement justifiable, aux yeux des citoyens européens, d’octroyer des aides à certaines catégories d’agriculteurs, sans aucune obligation de production.


La demande alimentaire est en général peu élastique, si bien que de faibles variations de
volumes entraînent d’importantes variations de prix. C’est pourquoi, il vaut mieux agir en
amont, sur la maîtrise des quantités, que de corriger, en aval, les effets pervers des
fluctuations erratiques des prix. Cela signifie, en d’autres termes, qu’un système
d’assurances de revenus, qui serait mis en place pour compenser a posteriori les fluctuations
de prix, risque d’être infiniment plus coûteux et moins efficace qu’un système de régulation,
en amont, des volumes de production.


Enfin les économistes considèrent qu’il n’y a pas d’économie d’échelle déterminante en
agriculture. Par conséquent, une agriculture constituée d’un nombre important
d’exploitations de dimension suffisante pour rémunérer le travail familial, est aussi efficace,
au plan macro-économique, qu’une agriculture constituée d’un nombre restreint de grandes
exploitations basées sur le salariat. La concentration irraisonnée des exploitations n’apparaît donc plus nécessairement comme un gage d’efficacité et de compétitivité de la branche. Dans une perspective de développement durable, la compétitivité de l’agriculture doit en effet se mesurer de manière globale selon les trois axes de performance économique, environnementale et sociétaire.

Depuis 1980, la communauté internationale a régressé dans ses efforts pour parvenir à maîtriser l’instabilité des cours mondiaux.
Les solutions qui ont été progressivement mises en place sous l’influence des organisations
internationales, visent à démanteler les dispositifs d’intervention physique (politiques de
stockage et de gel des terres notamment) au profit d’instruments financiers (loan rate,
paiement compensatoire ou aides directes découplées, assurances de revenus, etc ). Elles
contribuent, au contraire, à entretenir la volatilité des cours mondiaux, voire à l’aggraver en
reportant sur le marché mondial le déséquilibre du marché domestique.

L’affirmation du principe de la souveraineté alimentaire, doit permettre aux pays les moins
avancés de protéger librement leurs marchés afin de développer leurs capacités de
production, comme le font d’ailleurs les Etats Unis. Les pays en voie de développement
sont les grands perdants du processus de libéralisation.


Les accords multilatéraux type OMC, n’a de sens que pour autant qu’elle s’articule à des politiques nationales ou régionales (type PAC) cohérentes.
En raison de l’interdépendance des marchés et des productions et compte tenu de l’extrême
diversité des conditions économiques, environnementales et sociales de chaque pays et de
chaque région, il est illusoire de prétendre formater les politiques agricoles dans un moule
unique, comme tentent de le faire l’OCDE et l’OMC. Il est illusoire également d’imaginer
l’existence d’un outil miracle (par exemple le découplage) susceptible de répondre à
l’ensemble des problèmes à résoudre. Une politique agricole efficace est nécessairement complexe.


Stockage et maîtrise des flux : des outils qui restent indispensables demeurent des dispositifs classiques d’intervention par stockage et déstockage dès lors que l’intervention en amont sur les flux reste moins coûteuse que la correction en aval des fluctuations de prix ou de revenus. Mais ces dispositifs trouvent eux mêmes leurs propres limites dans l’accumulation des stocks. Ils doivent dès lors être assortis de mécanismes qui limitent leur recours dans le temps et en
quantités.

Conséquence des propositions précédentes, la protection aux frontières constitue un outil
indispensable de toute politique agricole et alimentaire. Il est par ailleurs regrettable de ne pas avoir recours à l’article XXVIII du GATT, toujours en vigueur, qui permet une renégociation des concessions tarifaires. Les propositions faites dans le cadre du Cycle de Doha sont porteuses d’importants facteurs de perturbation des marchés, notamment des marchés européens. L’Europe n’a donc aucune raison de supporter seule les conséquences négatives d’une libéralisation des seuls échanges agricoles et n’a donc pas à se sentir obligée de consentir de nouvelles concessions pour conclure le Cycle de Doha. Dans la mesure où seule une minorité de pays émergents exportateurs paraît trouver son compte dans les propositions actuelles, l’absence d’accord ne peut en aucun cas être considérée comme un échec politique, mais plutôt comme un simple retour aux réalités économiques.


les coûts de production européens resteront le plus souvent supérieurs aux cours mondiaux. La flambée conjoncturelle actuelle de certains prix démontre une conjoncture de court terme favorable mais parfaitement instable. La difficulté à dénombrer les actifs agricoles au sein de l’Europe (définition très variable d’un pays à l’autre) suggère que le plafonnement ou l'ecrètage des aides et leur péréquation entre les différentes catégories de producteurs se fasse dans un cadre national.





Conclusion
Dans une période où le devenir de la PAC est mis en débat (Bilan de Santé de 2008,
Perspectives Financières du budget global européen, et préparation de l’échéance 2013),
l’euphorie actuelle que connaissent certains marchés agricoles constitue un facteur de
confusion, comme le prouvent les options dérégulatrices actuelles de la Commission.
Contrairement à ce que laissent entrevoir les projets de la Commission ou nombre de
discours politiques. Aucune analyse économique sérieuse ne permet de penser que les
marchés, livrés à eux-mêmes, peuvent durablement assurer, sans dysfonctionnements
importants, la sécurité alimentaire et la sécurité sanitaire des aliments de 500 millions
d’Européens, dans le respect de normes sociales et environnementales exigeantes. Rien ne
serait plus irresponsable que de penser que l’Europe n’a plus besoin de politique agricole, et
que, en l’absence de toute intervention régulatrice des pouvoirs publics, les prix seraient en
mesure de s’ajuster durablement aux coûts de production européens. Enfin en raison même
de sa puissance, l’Europe ne peut échapper à ses responsabilités vis-à-vis des pays en voie de
développement.


Pour exercer sa souveraineté alimentaire à partir d’une agriculture durable, l’Europe a
besoin d’une politique agricole volontariste forte. Pour construire cette politique, il faut savoir
s’affranchir des modes intellectuelles du moment et savoir tirer les enseignements d’une
histoire alimentaire riche en retournements imprévus. Dans les premières périodes de sa
construction, l’Europe a su se doter d’une politique agricole efficace pour répondre à ses
besoins du moment. Aujourd’hui ceux-ci ont considérablement évolué ainsi que la dimension
de l’Union Européenne devenue la première puissance économique du Monde. Il ne s’agit
donc certainement pas de cultiver la nostalgie, pour prôner le retour à la politique agricole
originelle qui fut conçue dans un autre contexte, avec des moyens adéquats. Mais rien ne
serait à l’inverse plus absurde que de prétendre ignorer les enseignements du passé, lors de
l’élaboration de la politique agricole d’avenir dont l’Europe a besoin.



Signataires
Gilles Bazin Denis Hairy
Lucien Bourgeois Michel Jacquot
Jean-Marc Boussard Jean-Christophe Kroll
Jean-Claude Clavel André Neveu
Hélène Delorme François Papy
Joseph Garnotel Claude Servolin



rapport complet en PDF http://www.ceri-sciences-po.org/archive/juin08/art_pac.pdf

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