
Selon les mutuelles, ce retrait introduit une distorsion de concurrence avec les sociétés privées, car elles ne peuvent pas aujourd'hui procéder à des développements ou à des rapprochements transfrontaliers. La déconvenue est d'autant plus vive que les sociétés et les coopératives ont, elles, été dotées d'une dimension européenne.
Ne baissant pas les bras, les mutualistes ont depuis rédigé un avant-projet de statut européen permettant à leurs entreprises sans capital social de pouvoir se rapprocher en se constituant en groupe mutuel. Ils se sont inspirés du modèle existant en France.
Mardi 18 mars, réunies à Bruxelles, l'Association des assureurs mutuels et des coopératives d'assurances en Europe (Amice, représentant environ 30 % du marché de l'assurance européenne) et l'Association internationale de la mutualité (AIM) ont à nouveau évoqué les moyens de faire valoir leur texte auprès de la Commission.
Pour cela, elles doivent rallier à leur thèse l'ensemble des pays, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Un premier groupe favorable à ce projet compte notamment la France, le Royaume-Uni, la Belgique, la Suède, l'Italie, la Finlande et le Portugal. Un second, hostile au texte, rassemble, autour de l'Allemagne, la Hongrie et l'Autriche.
Les Allemands estiment qu'ils n'ont pas besoin de ce statut pour leur croissance en Europe. Si deux mutuelles veulent se rapprocher, elles créent des sociétés anonymes auxquelles elles apportent leurs portefeuilles d'activités.
En France, si une mutuelle veut se développer à l'étranger, elle n'a pas d'autre choix que de racheter une société privée par le biais d'une filiale. Elle ne peut pas constituer de réseau mutualiste européen.
"Les mutuelles doivent pouvoir nouer des partenariats avec leurs homologues européens, directement les unes avec les autres. Le projet que nous proposons le permet", affirme Jean-Luc de Boissieu, secrétaire général du Groupement des entreprises mutuelles d'assurances (GEMA). Si le cas ne s'est pas encore présenté, "on ne peut pas exclure que d'ici cinq ans des mutuelles françaises soient tentées de le faire en Europe", prédit M. de Boissieu.
Le plus marquant est cependant le désintérêt de la Commission. Elle n'a pas bougé malgré les six motions votées par le Parlement européen lui demandant de rouvrir le dossier, la dernière remontant à juin 2007. Comme si elle n'était pas convaincue de sa nécessité pour le secteur.
Bruxelles est plus focalisé sur le nouveau cadre réglementaire en matière de gestion des risques pour les sociétés d'assurance, réforme baptisée "Solvabilité II". L'espoir, certes ténu, est que cette question intéresse la France, qui doit prendre la présidence de l'Union au deuxième semestre.
LE MONDE 21.03.08
Dominique Gallois
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